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Et la nuit sera calme

+ d'infos sur l'adaptation de Kevin Keiss ,
mise en scène Amélie Enon

: Notes d'intention

À l'origine de la pièce
Nous nous sommes réunis autour des Brigands de Schiller avec le désir de faire émerger nos brigands. La pièce de Schiller est une fresque immense, pleine de cris et de chants, ceux de l'insoumission et de la liberté, ceux du questionnement sans cesse répété de l'homme sur sa condition.
À travers « nos brigands », nous nous demandons comment des individus se choisissent et, pensant se fédérer dans le but de transformer le monde, se transforment d'abord eux-mêmes. À quel moment, en effet, un homme décide-t-il de ne plus obéir – préférant mettre sa vie en jeu ?


La réécriture
Entre la pièce du grand répertoire romantique allemand et la réécriture que nous proposons s'édifie une passerelle, à la fois historique et fictionnelle, traduisant notre volonté d'inscrire notre travail dans un rapport au temps qui ne soit pas en rupture mais en dialogue avec notre héritage.
Schiller écrit Les Brigands à l'âge de vingt-et-un ans. Il est alors étudiant en médecine à l'école militaire de la Karlsschule. Jeune et révolté, vivant difficilement son enfermement dans cette institution aux règles strictes, il trouve dans l'écriture le moyen de se libérer d’un monde par trop oppressant. Cette première pièce apparaît comme le cri d'une jeunesse tourmentée et c'est ce coup d'envoi d'une révolte que nous choisissons pour notre première création.
C'est à partir de la mémoire de la pièce de Schiller que nous avons imaginé Et la nuit sera calme. Elle se veut le reflet de notre jeunesse et des interrogations qui lui sont propres : comment une jeunesse consciente de ses volontés d'émancipation brise-t-elle les carcans qu'on lui impose et reformule-t-elle ses exigences de liberté?
L'écriture de Et la nuit sera calme, renouvelant les problématiques originales, apparaît comme un palimpseste. On y retrouve en partie la trame de la pièce de Schiller, mais celle-ci vole en éclats et l'on interroge son lyrisme et ses problématiques à l'aune des nôtres.


Bâtir un espace des possibles
C'est contre un monde croupissant et sans acte que se dressent les personnages de notre drame. La paix perpétuelle instituée par décret dans tout le pays leur apparaît comme un leurre, une machine à tuer les libertés, une impossibilité de se créer soi-même. Au monde ancien et enfermé dans ses idéaux s'oppose le monde bouillonnant de la jeunesse que représentent Karl, Franz, Amalia, Héléna, Sarah, Moritz et Paolo.
C'est dans cette dichotomie que nous avons pensé l'espace de notre projet. Il fallait un espace préservé, un lieu qui serait réinventé par les projets, l'imagination et les rêveries des personnages : l'espace des possibles où la transformation peut advenir.
En effet, les personnages se posent en opposition, sont en révolte face au monde qu'on leur laisse en héritage, ce monde leur apparaît comme un espace clos, une cage, dont il conviendrait de s'extirper.
Néanmoins, cet espace est également le lieu de l'épreuve car, face à la logique incompréhensible d'un monde qui sans cesse se dérobe, les personnages se perdent, se heurtent à des obstacles qui sont autant d'empêchements à leur devenir d'hommes libres. C'est en bordure de cet espace où s'amassent les restes, les traces, les débris, que nous plaçons l'espace des possibles.


Réinventer le monde
Voulant fuir l'histoire à laquelle ils sont soumis afin de se réapproprier leur destinée, nos personnages donnent le champ libre à leurs fantasmes et à leurs rêves de révoltes. C'est par la parole que les choses se transforment et interviennent dans l'espace des possibles, un peu à la manière dont les jeux d'enfants les transportent au coeur-même du monde qu'ils réinventent. Dans la pièce, la forêt, lieu où se réfugient les insurgés, semble un lieu de passage ; pourtant il s'ancre dans notre pièce comme le point de voûte de notre espace scénique. La forêt est un lieu unique et multiple à la fois que nous choisissons pour son aspect puissamment polysémique. La forêt est hors des limites du monde civilisé, il s'agit d'un monde à l'intérieur et à l'extérieur du monde, lieu du songe et de l'enfance, terre des arbres et de l'obscurité primitive : en franchissant ses limites on fait l'expérience de soi-même. La forêt est un lieu asocial et sans règle, naturel et sauvage. La forêt est ce lieu typique du conte d'apprentissage qui, à la manière du labyrinthe, révèle au héros sa propre identité. Cette « immensité fermée » conduit l'homme à franchir les limites de son destin.

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