Le bourgeois Orgon est sous influence. Depuis qu'il a recueilli chez lui Tartuffe, pauvre homme pétri d'une austère piété, sa famille se divise à son sujet. Et lorsqu'Orgon prétend donner en mariage sa fille Marianne à l’encombrant directeur de conscience, la perte de la communauté semble inéluctable. Alors la parole jusque-là interdite se libère par vagues de plus en plus violentes : parole d’insubordination pour les uns, de passions réprimées, exprimées ou sacrilèges, pour les autres.

Tartuffe ou l’Imposteur n’est pas seulement le chef d'œuvre le plus souvent joué dans la Maison de Molière. 350 ans après sa création, cette charge satirique contre les faux dévots, interdite dès les premières représentations, n’a pas pris une ride. La captation du spirituel par le politique traverse l’histoire des religions et le XXe siècle ne fait pas exception puisque, décidément, l’irrationnel sied aux manipulateurs. Un ministre des cultes ne déclarait-il pas en 2004 : « L’espérance et la foi apparaissent, pour bon nombre de nos compatriotes, comme les seules réponses utiles face à l’angoisse des origines et de la fin » ?

Éric Massé et sa troupe d’acteurs, autour de Pierre-François Garel et Angélique Clairand, questionnent avec vigueur par le prisme de cette tragi-comédie familiale la foi et ses dérives. À nos angoisses contemporaines ils apportent la réponse cinglante de Molière : une furieuse envie de rire.