: Extrait de la note de mise en scene
Un cauchemar en vaudeville
Après avoir exploré l’oeuvre de Fassbinder, j’avais envie de continuer à explorer ce qui continue de constituer un moteur essentiel de notre société: la peur.
L’affaire de le rue de Lourcine est un ovni théâtral qui est plus proche du théâtre de l’absurde et de Kafka que du vaudeville. Dans cette oeuvre, la mécanique du rire va être au service de la mécanique de la peur et servir à décrire l’Empire déclinant, perdant ses repères et se déshumanisant.
L’action se déroulera autour d’une fontaine, symbole d’abondance et de l’aisance sociale du rentier Oscar Lenglumé. Mais celle-ci s’apparentera vite au trou de mémoire de Lenglumé, sa « lacune ». A l’intérieur, c’est une bourgeoisie qui prend l’eau. A l’extérieur, c’est la fin du monde, la fin d’un monde : il pleut des trombes d’eau, tout le monde est malade, il fait un orage apocalyptique. Et bien sûr, toute l’attention se porte sur ce fameux parapluie perdu… Cela ressemble à l’humour noir d’Alfred Hitchcock.
Ce matin-là, nos deux héros se réveilleront encore costumés (en créatures) du bal de la veille où ils se sont roulés dans l’orgie et la débauche, et à partir de là plus rien ne sera comme avant. Nous assisterons à une métamorphose : celle de l’humain au monstrueux. Nous allons pouvoir observer ces « insectes petit-bourgeois-roi » étouffer remords et culpabilité et tenter d’éliminer les autres pour sauver les apparences et les acquis.
Selon la tradition du vaudeville, la pièce comporte des chansons. La musique composée par Pablo Elcoq viendra renforcer l’idée du cauchemar tout en gardant de l’humour, de la légèreté et de la poésie.
La pièce est drôle et féroce. Elle se termine par un Happy-end tout relatif qui laisse un goût amer. Le temps d’un quiproquo Labiche évoque tous les tabous possibles: adultère, bisexualité, homosexualité refoulée, meurtre, alcoolisme, secrets, cachotteries, chantage et mensonges. Les masques sont tombés et même s’ils sont « innocents » on sait désormais de quelle scélératesse nos compères sont capables. La frontière entre l’inconvenance et la bienséance est une chose fragile et il semblerait que nos pulsions intimes soient en lutte permanente contre la morale et la décence.
Yann Dacosta
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