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: Note d’intention

PAR Marcial Di Fonzo Bo et Élise Vigier

Comment ces jeunes spectateurs imaginent l’origine des premières prises de vue ?
Georges Méliès a transgressé comme un scientifique fou les premières fictions au cinéma, c’est aussi le cas de Buster K. mais chez lui, c’est l’acteur qui est au centre de l’image avec une intensité poétique bouleversante :
Buster Keaton « l’homme qui ne sourit jamais », beaucoup moins connu du public que Charlie Chaplin, fut l’un des grands inventeurs du burlesque. Sa figure triste, impassible et silencieuse traverse toutes les cascades, embuscades et péripéties, invente une poésie du burlesque.


Buster Keaton en fait l’expérimentation, toujours face ou avec des éléments extérieurs à lui :
la maison démontable, le train de la Générale, le scaphandre de la croisière du Navigator, ou encore le piano du grand duo avec Charles Chaplin dans Les feux de la Rampe. Séquences mémorables que nous voudrions restituer sur scène.


La figure qu’on retient est toujours celle de l’homme seul, qui ne sourit jamais.
Qui dit son impossibilité à sauver le monde de ces rouages modernistes et de ces multiples catastrophes. Mais qui réussit à les traverser, à s’en relever, impassible, car l’art du burlesque peut transformer la vie.
Cet homme mélancolique, face au monde moderne, sera parfois « deux » et alors le couple intervient comme une bouée de sauvetage, un abri, un idéal qu’il n’atteindra jamais. Ces couples burlesques vivent des mini-catastrophes, des rapports amoureux, des rapports d’entraide, d’accompagnement, de dualité, et surtout font face aux événements ensemble.
Un  « ensemble  » chaotique, burlesque, tendre et très drôle.


Il s’agira de traverser les films de Buster Keaton à travers différents décors et différentes scènes, à partir de la figure de l’opérateur, dans LE CAMERAMAN, on croisera la séquence de l’ouragan ou de la maison pliée avec Sybil Seely dans la MAISON DEMONTABLE, la scène de la Croisière du NAVIGATOR, où Buster Keaton prend l’eau à l’intérieur de son scaphandre, et où Katryn Mc Guire essayant de le sauver le noie encore plus, ou encore tous les deux en scaphandre main dans la main, pour la fin heureuse du film. Ou encore la très belle séquence dans MA VACHE ET MOI quand il porte Kathleen Myers, pour qu’elle puisse voir à l’horizon si la catastrophe arrive ou si elle est déjà passée.


Retraverser sur scène ces duos burlesques donne à voir une modernité dans les rapports « homme-femme », un hommage à « être deux », une invention toujours possible, un rebond face aux catastrophes du monde et de la vie, un espace qui mêle tendresse et rire.


Dans ces fictions, « on peut tout faire », on peut avoir une maison pliable, on peut affronter une tornade et ne pas mourir, on peut s’aimer alors que l’on est sans abri sous une pluie torrentielle, on peut prendre l’eau dans un scaphandre... Il nous semble essentiel de donner à voir pour un spectacle jeune public  « ce décollement » de la réalité terrible du monde dont nous sommes sans cesse abreuvés.


On peut aussi « tout apprendre » comme dans cette magnifique scène où Buster Keaton, projectionniste, après avoir rêver d’un film pendant qu’il en projette un autre, se réveille et voit arriver sa fiancée. Il ne sait quels gestes faire, et reproduit en direct la scène de demande de fiançailles du film qu’il regarde. Le cinéma devient alors un lieu d’apprentissage.


Nous allons, comme pour Méliès, raconter cela avec les outils du théâtre, avec les décors qui seront construits dans les ateliers de la Comédie de Caen.
Le spectacle donnera à voir le tournage d’un film qui prend corps sous les yeux des spectateurs qui voient comment se fabrique une œuvre d’art. C’est un hommage à un artiste artisan qui invente au fur et à mesure, qui fait de chaque obstacle sur sa route une aiguillon pour inventer encore et encore. Il réalise ses rêves les plus fous devant nous, rien ne l’arrête.


Nous voulons que cette création soit un hommage à l’imagination sans limite de cet artiste explorateur d’un monde en construction, celui du cinéma. Un dispositif scénique permettra, à la manière des séquences tournées en studio, de reproduire sur scène un wagon de train, une locomotive, la maison tournante, pliable ou chancelante, un aquarium pour que les scaphandriers puissent y plonger. Nous jouerons sur des rapports d’échelles différents, avec des maquettes ou des miniatures, et nous donnerons à voir ce travail très concret de l’art de la fiction.


Le texte du spectacle sera écrit à partir des interviews, des articles, mais aussi des pancartes des films. L’écriture du spectacle s’organisera autour de la figure muette impassible de cet homme qui ne sourit jamais. Nous voulons garder le mystère de ce corps muet, élégant et résistant à tout. Il s’agira d’une voix off, ou d’une ou plusieurs voix au micro à côté, en parallèle de l’action.


  • Marcial Di Fonzo Bo et Élise Vigier, Novembre 2019
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