Dans Quartett de Heiner Müller, qui est une réécriture d'une brièveté incandescente des Liaisons dangereuses de Laclos, Merteuil et Valmont ont vieilli, mais leur terrain de jeu, leur abîme intime, leur chaos, demeure celui de l'érotisme, une image féconde : le musée de nos amours avec les statues de nos désirs en décomposition.

Dans Merteuil, variation, adapté de Quartett, la marquise de Merteuil est jouée par un homme, David Arribe. La feuille de route pour cette création pourrait être : frisson des identités mouvantes, obsession de la jouissance, angoisse du temps qui passe. Merteuil est seule en scène, le désir palpite encore et avec lui le fantôme de Valmont. Continuons à jouer... L'art dramatique des bêtes féroces. La mise à mort rôde, Thanatos qui « rejette l'homme dans l'animalité » pour Georges Bataille.

En 2013, j'ai déjà connu le vertige de mettre en scène Quartett. Est-ce le confinement que nous venons tous de vivre qui motive aujourd'hui la résurgence de ce texte à travers Merteuil, variation ? L'empêchement qui nous fut imposé a peut-être réveillé le goût si particulier de l'enfermement à l'oeuvre dans le texte de Müller...

Jean-François Matignon, metteur en scène