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Via Injabulo

Amala Dianor ( Chorégraphie ) , Marco Da Silva Ferreira ( Chorégraphie ) , Buru Mohlabane ( Direction artistique ) , Steven Faleni ( Direction artistique )


: Entretien avec Amala Dianor

Propos recueillis par Moïra Dalant

Comment avez-vous envisagé votre travail avec les danseurs de la compagnie sud-africaine Via Katlehong ?


Amala Dianor : Mes premières réflexions et envies ont été un peu bousculées lors de ma visite aux Via Katlehong dans le township. En rencontrant Buru Mohlabane et Steven Faleni, j’ai découvert des personnes avec une énergie extraordinaire et un engagement dans le travail qui est aussi un engagement civique et politique. Ce qu’ils font est nécessaire à l’activité de cette cité. J’ai été touché par la réalité du lieu, Katlehong est un township avec beaucoup d’habitants qui vivent sans électricité dans un contexte insalubre. La population a été fortement impactée par la crise du covid. J’ai été témoin malgré tout d’une pulsion de vie chez les danseurs de la compagnie. Il s’agissait presque de créer un « projet pour guérir », c’est-à-dire pour raviver la joie. Le week-end est un moment très festif à Katlehong. Je me suis retrouvé plongé dans cette vie en immersion complète, à faire l’expérience d’un rapport clanique au relationnel, c’était très beau. C’est d’ailleurs cela même l’essence de leur projet : faire un programme ensemble, faciliter une rencontre entre leurs danseurs et des chorégraphes internationaux, rechercher les différences pour trouver un équilibre... Mon projet de départ s’en est trouvé un peu transformé. J’avais envie d’aborder les libertés et le pouvoir enfin acquis après l’apartheid, les problématiques relationnelles entre les communautés noires et blanches, mais aussi la manière dont la jeunesse trouve son chemin à travers cette histoire-là, dans ces nouveaux rapports de force, dans les instabilités et les insécurités d’aujourd’hui. Il s’agissait d’une certaine manière de parler de l’entre-deux, en zoulou emaphakatini cet endroit « in between » où chacun tente d’exister et de trouver son identité entre les deux extrêmes, entre deux communautés qui coexistent sans aucun partage réel. En découvrant l’énergie du groupe et en travaillant dans le township, cette envie de départ s’est modifiée et enrichie pour parler de la joie de se retrouver.


Vous avez fait de cette rencontre une vraie ode au partage et à la vie...


Ma pièce s’affiche comme un hymne à la jeunesse, un hymne à la danse et à la musique. Des musiques dérivées de la house à la danse pantsula, la musique fait partie intégrante de la vie du township et de la compagnie. L’amapiano, notamment, est très en vogue, un style musical dérivé de la house qui remplit l’espace en permanence, et accompagne les moments de partage, d’engueulades, de réconciliations. Je voulais parler de tout cela dans la pièce, pour donner la part belle à cette énergie de vie joyeuse, pétillante, à cette jeunesse explosive qui danse, tout en montrant le revers de la médaille, la tension inhérente au pays, l’ambiance politique instable et complexe entre les différentes communautés d’Afrique du Sud. L’impossible discussion entre les communautés blanches et noires, les rapports de pouvoir qui sont en négociations constantes... Tout cela entraîne des tensions tangibles dans les relations et discussions au quotidien. Et mon questionnement se déplace aussi à l’endroit de la fête. Quand la fête se termine, que reste-t-il ? Quelle est notre réalité ? Je souhaite être au plus juste de cette jeunesse-là, au plus proche de ses préoccupations.


  • Propos recueillis par Moïra Dalant
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