Une plage. Un transat. Une blonde,
plantureuse, presque nue, bronze,
lunettes noires, miroir de réflexion pour
accélération du bronzage, et chant de la
vacance, jouissance de l’inaction. Entre
mademoiselle Chloé qui fait visiter à un
jeune homme le lieu qu’on prenait pour
une plage. Visite d’appartement. Une
cuisine. Le jeune homme s’installe. On
comprend que le jeune homme est là
pour se foutre en l’air. Il chante, tente de
se suicider, et se rate beaucoup. C’est la
blonde, qu’il ne voit pas, qui l’empêche.
Elle chante avec lui. On comprend peu à
peu qu’elle est morte, depuis longtemps,
elle ne le savait pas. Chloé, mécontente,
reproche ses ratages au jeune homme.
Tant qu’il vit encore, elle ne peut pas faire
commerce de sa chair. Elle avait en effet
organisé un service de restauration rapide,
pour vendre des crêpes au goût de chair
tendre : des crêpes au goût d’humanité.
Mais le jeune homme, dans l’ombre du
fantôme sensuel, reprend goût à la vie
petit à petit et en chansons, tandis que
Mademoiselle Chloé s’éprend de lui. De
son côté, la jeune fille blonde retrouve
son amant mort, qui est en réalité le père
défunt de mademoiselle Chloé et par la
même occasion le pianiste de la pièce. Les
fantômes peuvent mourir enfin tranquilles
et amoureux. Et les vivants réapprennent
à vivre en se souvenant qu’ils ne sont pas
déjà morts.

Pierre Notte