« Le théâtre, c’est un art de l’enfance, aime à dire David Lescot. C’est le jeu prolongé à vie ! » Depuis Les Conspirateurs en 1999, l’auteur et metteur en scène, également acteur et musicien, esquisse à traits fins le dessin d’une oeuvre dans laquelle frissonne encore le bruissement des années d’enfance. Souvent d’ailleurs les souvenirs lutinent en ombres portées entre les lignes, taquinant d’une pointe d’ironie leur humeur mélancolique. C’est avec Les Jeunes, en 2012, que David Lescot ose l’adresse à la jeunesse : il se faufile alors dans les coulisses de l’adolescence et raconte en musique l’ascension et l’explosion de deux groupes de rock.
Dans J’ai trop peur, il se glisse dans la peau d’un gamin de dix ans, effrayé par son entrée prochaine au collège. Avec une affectueuse drôlerie et une saisissante acuité, il montre les affres que traverse le garçon durant les grandes vacances, imaginant que l’attendent les pires sévices. « C’est l’âge où commence à poindre le sentiment existentiel, où s’ouvre l’exploration de l’intériorité… Il faut quitter le monde de l’enfance et avancer vers l’inconnu. »
Pour composer une langue originale, à la fois proche du réel et décalée, propre à l’âge de chaque personnage, David Lescot a puisé dans le parlé des tout-petits et des ados : « Je pars de l’écoute et de l’observation pour travailler le style, qui n’est ni imitation ni pure invention, et les situations. Les enfants s’engagent avec ferveur dans ce qu’ils font. Chez eux, les situations sont tendues à l’extrême et les sentiments exacerbés. Le tragique éperdu côtoie le puéril. » Sans doute est-ce ce qui donne tant de force à ce spectacle, qui se vit comme l’expérience d’un passage initiatique.

Gwénola David