Europeana n’est ni un essai, ni un livre d’histoire. Mais un véritable poème, anarchique et sauvage comme il se doit.

La catastrophe antérieure au récit serait le BUG du Millénium : les ordinateurs auraient identifié de façon erronée l’année s’annonçant pendant la nuit du 31 décembre 1999 et cela aurait été comme si le XXe siècle n’avait jamais existé.
Le livre fait parler une voix, ou des voix naïves et enfantines que re-trouvent joyeusement la mémoire par bribes et dans le désordre.
La chronologie est totalement explosée et les événements se télescopent et s’accumulent faisant se côtoyer par exemple les guerres du siècle avec les inventions techniques, les grands et les petits progrès. Par exemple les avancées de la médecine ou de l’astronomie avec l’invention du soutien-gorge ou des poupées Barbie.
Cette mise à plat est d’un effet jubilatoire et provoque une méditation active sur les différents statuts de la mémoire. Qu’est-ce que faire le deuil ? Comment mettre à la bonne distance les événements du passé qui nous traumatisent ? Comment faire face à l’oubli qui nous déracine ? Qu’est ce que veut dire écrire l’histoire ?

Le livre de Patrick Ourednik, très iconoclaste, ajoute du chaos à notre propre chaos. Un humour qui s’inscrit dans la lignée de Kafka ou de Hrabal, de cet humour que Brecht qualifiait d’arme pour les désespérés. Un livre urgent !