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Hanokh Levin

Israël – 1943 - 1999

Présentation

Né à Tel-Aviv en 1943, décédé prématurément en 1999, Hanokh Levin, figure majeure du théâtre israélien contemporain, nous a laissé une cinquantaine de pièces de théâtre, ainsi que plusieurs recueils de poésie et de prose. S’il doit une entrée en scène fracassante et sulfureuse à ses textes politiques (il dénonce dès 1969, dans son premier cabaret Toi, moi et la prochaine guerre, l’engrenage de violence induit par la politique d’occupation de son pays après la guerre de 1968), ce sont ses comédies qui, à partir de 1972, lui ouvrent en grand les portes du monde théâtral. Yaacobi et Leidental, qui sera aussi sa première mise en scène, peut être considéré comme la pierre (tri)angulaire de « l’ère Levin » en Israël, période de plus d’un quart de siècle (jusqu’en 1999) rythmée par une création presque tous les ans et presque toujours dans une mise en scène de l’auteur.

Les années soixante-dix voient donc naître les personnages leviniens, ces petites gens dont le principal problème dans l’existence... est l’existence elle-même, principalement la leur ; qui rêvent de courir le marathon sans se rendre compte qu’ils ont mis les pieds dans des chaussures de plomb. Ils s’appellent Kroum, Popper, Yaacobi, Potroush, Kamilévitch, et nous racontent tous ce combat perdu d’avance qui nous est commun, à nous autres, êtres humains. Insérés dans le microcosme du couple, de la famille ou du quartier, ces atteints de médiocrité aigüe ont beau essayer feintes sur feintes, ils ne leurrent personne : c’est bien de nous qu’ils parlent et c’est bien nous qu’ils touchent. Nous qu’ils sauvent aussi, grâce à l’humour irrésistible d’un auteur qui ne peut que ressentir une infinie tendresse envers leur/notre maladresse constitutive.

Le succès étant au rendez-vous, Levin, qui dès le début des années quatre-vingts peut travailler sur toutes les grandes scènes de son pays, commence à chercher de nouvelles formes d’écriture et d’images scéniques. Il puise tout d’abord dans les grands mythes (Les Souffrances de Job, Les Femmes de Troie) puis façonne son propre théâtre épique (L’Enfant rêve, Ceux qui marchent dans l’obscurité) qui se cristallise en « drame moderne » au service duquel il met son langage théâtral si particulier, mélange de provocation, de poésie, de quotidien, d’humour et de formidable générosité.
Consacré par les prix israéliens les plus prestigieux, il n’en continue pas moins d’affirmer ses opinions à travers des textes politiques écrits au vitriol, ce qui lui vaut en 1982 de voir sa pièce Le Patriote rapidement retirée de l’affiche et en 1997, de déclencher une nouvelle levée de boucliers avec Meurtre.

Comme pour faire la nique à la mort, à qui, pendant trente ans, il a donné la vedette (elle apparaît dans toute son œuvre, c’est elle qui, toujours, dans un dernier éclat de rire, vient asséner la pire des humiliations), Levin, se sachant malade, écrit Requiem (ce sera aussi sa dernière mise en scène) puis Les Pleurnicheurs, dont il entreprend les répétitions en mai 1999. Réalité qui devient théâtre ou théâtre qui devient réalité, il dirige de son lit d’hôpital des acteurs qu’il cloue sur un lit d’hôpital tandis que d’autres – le personnel soignant – leur jouent, en guise de « divertissement », la tragédie d’Agamemnon... Une mort qui le rattrape sans lui laisser le temps de voir aboutir son projet. Le 18 août 1999 Hanokh Levin s’éteint après un combat de trois ans contre le cancer.

Grâce à la Maison Antoine Vitez qui, en 1991, a été la première institution à soutenir l’entreprise de traduction des pièces de Hanokh Levin, l’œuvre de ce grand auteur a pu atteindre le monde du théâtre français, qui s’est petit à petit ouvert à son écriture si singulière.

Le processus enclenché par Jacques Nichet en 1996 avec la création de Marchands de caoutchouc au Théâtre des Treize-Vents à Montpellier, s’est emballé. Après François Rancillac et Philippe Adrien, après de jeunes metteurs en scène comme Clément Poiré ou Laurent Brethome, après Stéphane Braunschweig qui a monté L’Enfant rêve en 2006 au Théâtre national de Strasbourg (repris ensuite au Théâtre de la Colline), c’est Galin Stoev, qui offre à Hanokh Levin la scène du Studio-Théâtre. À travers un choix très personnel de textes courts (parmi les dizaines que Levin a écrits tout au long de sa vie), ce jeune metteur en scène bulgare apporte sa vision – d’une extrême modernité, incisive et qui sied à merveille à l’écriture abrupte de Levin – et crée un monde aux codes d’une logique totalement loufoque mais pourtant implacable, un monde qui, même s’il est entré dans le troisième millénaire, ne pourra éviter de placer l’homme et son combat existentiel au centre de ses préoccupations... s’il ne veut pas perdre ce qui lui reste d’âme.

Laurence Sendrowicz, février 2008

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